Catherine Guérin (55 ans)
Catherine est commissaire de police. Elle arrive à la fin de sa carrière avec tous les honneurs dont peut rêver un policier. Normalement, elle aurait dû finir au Quai des Orfèvres, mais elle a préféré la province. Son indiscipline, son indépendance, ses silences et ses facéties, ses trop nombreux détachements à l’étranger y sont certainement aussi pour quelque chose. Elle a formé les policiers de l’autorité Palestinienne à Gaza, elle a étudié la génétique au Canada, elle a participé à l’élaboration des fichiers informatiques Franco-Allemands. Elle a vadrouillé grâce à son métier, comme elle a papillonné dans sa vie. Catherine est mariée depuis trente-cinq ans avec Victor. Mais il lui faut plus de doigts pour compter les hommes avec qui elle a vécu que les mois qu’elle a passé avec Victor. Presque autant d’histoires d’amour que de voyages. Et une étrange relation qui s’est construite avec Victor.
Victor écrit des romans policiers, il tente d’écrire. Et ce n’est qu’au sein de ces manuscrits qui s’empilent sur les étagères qu’il évoque, avec un certain humour, les aventures de Catherine, tuant par procuration le petit ami du jour.
Comme deux vieux complices. Mais Catherine sait que la relation est loin d’être équilibrée. Elle est heureuse, il est triste.
Depuis quelques mois, depuis son départ dans le Sud de la France, elle sait que Victor a une aventure. C’est une sorte de soulagement au-delà de toute espérance. Enfin, Catherine n’est plus l’héroïne de ces romans inachevés, un homme prend sa place et se dessine sous la plume de Victor. Catherine ne dit rien, elle considère que ce n’est pas son rôle, surtout pas. Pourtant, elle a quelques réserves. L’élu du cœur de Victor s’appelle Paolo. C’est un ancien brigadiste italien. Un de ceux menacés d’extradition. Elle n’a rien à redire. Mais elle a peur que Victor ne se brûle les ailes.
Bien que les événements dépassent les simples compétences de la police, c’est à Catherine qu’échoit « l’affaire Pancho Villa ». S’il y a une chose dont elle est sûre, c’est que le travail des différentes agences de renseignement sur le terrain est particulièrement médiocre. Mauvaise interprétation des événements, infiltration de tous les groupes sauf ceux concernés par le soulèvement.
Et il y a la coopération. Les RG, la DST, la DGSE, passe encore. Ils sont juste bêtes et stupides. Mais cet infâme type de la CIA et ses discours patriotiques tout droit sortis d’un mauvais film catastrophe, non ! C’est sans doute l’espagnol de la CESID qui plaît le plus à Catherine. Patricio est exubérant, mais discret. Le seul à ne pas se la jouer. Le seul à la traiter correctement. Le seul avec qui elle peut écluser les bars à la nuit tombée. Le seul à porter quelque chose de vrai dans le fond de son œil, une image du 11 Mars encore battante.
La fille de Victor a suivi sa belle-mère dans le Sud. Depuis son arrivée, elle sort avec Steve, un jeune garçon issu de la cité. Un de ceux qui en est sorti. Catherine hésite, mais elle aimerait l’y faire replonger, se servir de lui pour entrer en contact avec Doroteo. Mais elle souhaite préserver sa belle-fille.
C’est l’ensemble de la famille qui finit par plonger. Le brigadiste de Victor a pris fait et cause pour les insurgés ; il descend rejoindre Catherine dans la tourmente. Victor replonge à son tour, happée par la fibre du roman policier, ne voulant à aucun prix passer à côté de ces événements qu’il trame déjà en un entrelacs romanesque.
« Catherine a la cinquantaine largement passée, elle n’en dit pas plus. Elle a un charme fou, mélange de séduction et de vraie désinvolture. Elle est en jeans et porte un chemisier sombre, ses cheveux sont détachés et en désordre. […]Le teint hâlé de Catherine contraste avec la mine blafarde de Victor. Il a 40 ans, mais c’est Catherine qui virevolte autour de lui.«