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Dulcie

Il y a 24 ans.

Le 29 mars 1988, Dulcie September, représentante à Paris de I’African National Congress (ANC) sud-africain, est assassinée au 28, rue des Petites-Écuries, à Paris, de cinq balles de calibre 22 tirées avec un pistolet muni d’un silencieux. Ce sera le dernier attentat de cette importance perpétré par les services spéciaux sud-africains en Europe.

Projet Δ

Δ, delta, le triangle, forme reine de la clandestinité :
trois hommes dont un seul est en contact
avec l’échelon supérieur.

Romanesque de la clandestinité, peinture d’une époque disparue, charisme d’un homme : mille raisons nous poussent à faire un film autour de Henri Curiel. Mais l’une d’elle est plus impérative que toutes les autres : Curiel nous donne des clés pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui et maintenant.

Violence dans les cités, violence politique, violence dans le cadre d’une société démocratique qui ne laisse pas la parole à tous. Ce sont des interrogations d’une cruelle actualité. Et l’action passée de Curiel tente d’y répondre ; il pourrait presque reprendre à son compte et au nôtre la phrase de Vercors : « Quand les libertés sont mortes, il n’est qu’une liberté qui subsiste, c’est celle que donne la vie clandestine. Il n’est jamais trop tôt pour s’organiser en vue de l’action secrète, la seule qui restera possible, selon toute apparence, d’ici peu. »

Henri Curiel est assassiné le 4 mai 1978, en bas de l’immeuble qu’il habitait dans le 5ème arrondissement de Paris.

Deux ans après son assassinat, « Solidarité », le réseau qu’il avait créé, prend fin. Certains militants sont arrêtés, les autres retournent à la « vie civile ». La mort d’Henri Curiel et la fin de « Solidarité » ont coïncidé avec un changement radical de la militance. Il y a trente ans, ces hommes et ces femmes étaient des militants professionnels. Soutenus par des motivations principalement politiques, ils abandonnaient travail et famille pour se jeter à corps perdu dans la militance. Faire un film sur Curiel, c’est aussi montrer cette capacité qu’avaient les individus autour de lui à faire des choix qui altéraient profondément leurs vies ; c’est montrer ce qu’est devenu l’engagement politique aujourd’hui.

Pendant plusieurs mois, nous avons travaillé, Alain Nahum et moi, sur un projet de film qui racontait Henri Curiel et « Solidarité ». Nous l’avons fait à une époque difficile, une époque où les projets sont jugés au regard de leur potentiel de communication. Le verdict était attendu: Curiel n’est pas assez connu. Nous avons tenté d’argumenter, l’invisibilité n’est-elle pas le propre de la clandestinité ? Justement, nous a-t-il été répondu…