A l’époque où je donnais encore des cours, je ne cessais de le répéter: écrire un scénario a très peu de chose à voir avec l’écriture.
On écrit peu. 50% du temps et de l’énergie est consacrée à essayer de comprendre ce que souhaite le réalisateur. Le faire parler, le faire formuler, encore et encore, écouter. Les 50% restant consiste à lui donner les outils pour se réapproprier le scénario. Il doit pouvoir revendiquer chaque mot du scénario. Ce foutu texte, il va se le traîner encore plusieurs mois (plusieurs années en réalité): le financement, la préparation, le tournage. Il va devoir le défendre, se battre pour lui. Il faut que ce soit le sien.
Ces deux étapes sont au coeur du travail. Elles sont différentes à chaque fois. Aucun réalisateur ne fonctionne de la même manière. Il faut tout réinventer à chaque fois.
Avec Yves, nous écrivons presque toujours une « version zéro »: c’est une version complète du scénario, basée sur les premières discussions de travail avec le réalisateur. C’est une version qui est censé faire réagir le réalisateur, lui donner du recul, nous permettre de mieux comprendre ce qu’il cherche, ce à quoi il tient et ce qu’il est prêt à abandonner.
La version zéro du « Mur du silence » n’a pas produit l’effet escompté. Jean-Claude Barny n’y a pas retrouvé ses petits, il l’a lue avec une grnde perplexité. Au temps pour nous. Nous n’avons pas su décoder ce qu’il désirait. Nous avons mésestimé sa réaction à la lecture d’un texte auquel il se sentirait extérieur.
Nous n’avons plus qu’à remettre l’ouvrage sur le métier, et à écrire une version zéro point un!